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JULIEN ALVAREZ

Chef Pâtissier

Julien Alvarez : l’orfèvre de la pâtisserie

Écrit par Nora Bussigny, @nora_bussigny

 

Champion du monde de pâtisserie en 2011, chef pâtissier de la prestigieuse maison Bristol pendant presque trois ans et récemment nommé chef pâtissier de la célèbre maison Ladurée, Julien Alvarez, qualifié de « technicien de folie » par Christophe Michalak, se livre sur son parcours et son incroyable savoir-faire.

 

Champion du monde de pâtisserie, est-ce la consécration pour vous ou, en compétiteur, vous avez déjà d’autres challenges en vue ?

C’était il y a dix ans et je l’ai vécu comme une étape, un passage lors d’une grosse phase de travail. J’ai un titre qu’il faut honorer au quotidien mais je ne m’assoie pas pour autant sur mes acquis. Par exemple, j’ai été extrêmement stressé en postulant au Bristol et chaque service que j’ai fait est resté une pression. Des challenges en interne on en a eu constamment : les évènements ou les changements de carte par exemple. Finalement, ces coups de pression réguliers entretiennent la flamme ! Le championnat du monde n’était pas un aboutissement en soi mais une expérience exceptionnelle qui m’a ouvert des possibilités multiples à l’étranger. Mais je suis lucide sur les compétitions : je connais des pâtissiers exceptionnels qui n’ont jamais remporté un concours. Quand on a conscience de ça, on peut faire part des choses entre avoir un titre et le travail au quotidien qui, à mes yeux, ne doit pas être abordé comme un pays conquis.

 

Pourquoi choisir de pâtisser pour des enseignes même prestigieuses plutôt que d’ouvrir votre propre pâtisserie ?

Je sais pertinemment qu’un jour je finirai ma carrière chez moi. Cela serait même un aboutissement ! D’ailleurs mon grand-père disait toujours qu’il « vaut mieux un petit chez soi qu’un grand chez les autres ». Mais aujourd’hui, j’ai l’opportunité de travailler avec des gens de qualités qui font appel à moi sur des projets très stimulants. Quand le chef du Bristol m’a contacté il y a quelques années en ayant pensé à moi, je me suis dit que c’était une occasion en or et je ne pouvais évidemment pas passer à côté ! Je ne suis pas pressé et je garde le projet de la pâtisserie en tête, mais pour l’instant je voyage beaucoup et, avec mon expérience, je peux toucher à tout et de nombreux projets s’offrent à moi, comme par exemple enseigner un jour la pâtisserie.

 

Votre père était lui-même chef cuisinier au château de Monbazillac ce qui vous a inspiré à vous tourner vers la cuisine, mais pourquoi cette spécialisation en pâtisserie ? Une préférence pour le sucré ?

Ce qui m’a attiré dans le travail de mon père, c’est la gastronomie. Très jeune j’ai pu découvrir de nombreux aliments et un vrai attachement au terroir. Mais j’étais un enfant turbulent qui préférait jouer au foot que d’aller en cuisine, d’ailleurs j’en ai très peu de souvenirs ! Mais quand je me suis vraiment posé la question d’un avenir après un cursus général, je me suis rendu compte que je préférais réaliser plutôt qu’étudier. Les métiers manuels m’attiraient. Mais, autour de moi, aucun restaurant ou cuisine n’éveillaient ma curiosité, et c’est finalement une très bonne boulangerie pâtisserie qui a attiré mon attention. Quand on débute en pâtisserie, la rigueur attendue nous permet de bifurquer en cuisine si jamais l’on change d’avis, car on apprend des procédés que l’on veut exécuter sans se poser de question. D’ailleurs, j’aimais beaucoup le sport, le cyclisme que j’adorais occupait ma jeunesse, et le fait de m’inscrire à des concours de pâtisserie m’a permis de me challenger à nouveau !

 

Vous utilisez beaucoup d’infusions et de thé, est-ce que cela a facilité votre travail quand vous étiez au Bristol pour l’élaboration de leur célèbre « tea time »?

Il y a quelques temps, une maison de thé est venue lorsque j’officiais encore au Bristol pour nous proposer une dégustation de plus d’une centaine de thés. J’étais moi-même un adepte du thé mais cette dégustation m’a permis d’approfondir mes connaissances ! Bien sûr, l’idée n’est pas d’infuser tous les ingrédients mais, les types de thés qu’ils soient aromatisés ou non, se prêtent à de nombreuses préparations à l’instar des sorbets ou des jus. Quant aux pâtisseries réservées au « tea time », je ne choisis pas de pâtisserie infusées au thé car ces dernières ont comme risque de ne pas être en adéquation avec le choix des clients pour leur propre thé.

Le millefeuille pomme, coing et céleri rave confits au bâton de cannelle
L’éclair au chocolat revisité

Vous exploitez des saveurs extrêmement originales en termes de goûts, comme le hêtre, le céleri ou encore la truffe noire, êtes-vous en perpétuelle recherche d’ingrédients rares pour étoffer vos créations ?

Oui c’est le cas. A vrai dire je m’appuie toujours sur des bases : des parfums assez francs et reconnaissables partout. Ensuite, j’aime créer du relief, une surprise. Les parfums que je vais utiliser se marient excellemment bien entre eux comme la châtaigne et le bois de hêtre par exemple. Avec le chef, quand nous travaillions sur des desserts à l’assiette on essayait de respecter au maximum la saveur de l’ingrédient principal, puis un autre ingrédient venait l’accompagner et permettre de l’interpréter différemment. Cependant, je ne cherche pas l’originalité envers et contre tous ! Mon but, quand un client mange un de mes gâteaux, est de susciter chez lui une émotion.

 

Vos pâtisseries sont un emblème du luxe, tout comme le Bristol ou encore Ladurée où vous exercez maintenant, avez-vous déjà eu envie de concevoir des pâtisseries très accessibles à des prix réduits ?

Globalement, je crée les desserts de la même manière que si je les faisais dans une pâtisserie. Une bonne tarte aux pommes, qu’elle soit dans une grande enseigne ou ailleurs reste une bonne tarte aux pommes. Les matières premières peuvent être abordables, certes certains ingrédients comme la truffe, récemment la vanille et même certains chocolats sont coûteux, mais en pâtisserie ce ne sont pas les matières premières qui coûtent le plus mais la main d’œuvre des artisans.

 

Quel est l’ingrédient que vous préférez exploiter pour vos créations ? Et quel est celui qui vous a donné le plus de fil à retordre ?

Il y a tellement d’ingrédients que j’aime utiliser, comme la vanille par exemple ! Mais si je devais choisir, je dirais le chocolat, c’est l’un des produits nobles par excellence : les saveurs sont tellement différentes selon les crus, même en fonction du lieu où les fèves ont été récoltées, d’ailleurs au Bristol il y avait même une chocolaterie qui permettait de découvrir une large palette de goûts !

Quant à l’ingrédient le plus complexe … Je dirais que j’ai beaucoup délaissé le marron durant un temps. Je le trouvais pâteux et inintéressant. Mais en allant au Japon où les japonais ont une passion pour le marron dans toutes ses déclinaisons, j’ai dégusté des desserts fabuleux ! Si je devais même évoquer l’un d’eux, ce serait évidemment le « mont blanc » dont raffolent les japonais et que j’ai pu déguster à maintes reprises durant mon voyage.

Le fameux cake marbré chocolat

Si vous deviez vous définir par une seule et unique pâtisserie, laquelle serait-elle ?

Je pense qu’il s’agirait de mon marbré chocolat. Son visuel montre une apparence complexe, mais finalement à l’intérieur il y a simplement un cake au chocolat et à la vanille.

 

Pourquoi avez-vous choisi de rejoindre Ladurée ?

Tout d’abord, je tiens à préciser que le Bristol m’a offert un très beau départ, avec beaucoup de témoignages d’affection et de reconnaissance qui ont été très touchants. En ce qui concerne mon nouveau poste, il faut savoir que Ladurée est une grande maison qui est en pleine expansion, beaucoup de projets me tentaient donc. Ladurée m’a contacté et, au fur et à mesure des discussions, j’ai compris qu’elle pourrait me permettre de m’exprimer, d’opérer des changements malgré le fait que ce soit une maison historique. Le projet qui m’est proposé est très passionnant, avec certes des incertitudes, mais aussi de belles surprises. Même si c’est encore confidentiel, je peux vous dire que nous allons installer de nouvelles boutiques et mettre beaucoup de choses en réflexion. C’est d’ailleurs un challenge dans une phase comme celle-ci car c’est une phase de départ qui doit malgré tout respecter l’ADN de la maison. Qu’est-ce que Ladurée de demain ? Nous allons le définir ensemble.

 

Instagram : @julienalvarezofficial

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